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33 ans de vie violée
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33 ans de vie violée
24 août 2017

Chapitre 2. La voix Il y a tellement de poids

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Chapitre 2. La voix

 

 

Il y a tellement de poids dans mon coeur, sur les épaules, qui pousse. Car je ne crois pas que l'on puisse poser son sac. On ne peux pas le poser car c'est comme un hématome enkysté. C'est dur. C'est sec. Et si vous y touchez, ca vous tire. Ca vous fait hurler.

Je n'ai jamais été une petite fille. 

Je crois qu'il faut commencer par cela. Je n'ai jamais été une enfant. J'ai toujours un sac de cailloux dans mes chaussures. Invisibles des autres et qui vous font souffrir atrocement à l'interieur. Et pourtant. Vous devez bien marcher. Marcher . Marcher. Et ne pas parler. Ou faire semblant. 

Je te promets que ces cailloux, sont devenus des rochers, des montagnes, et ils m'ont aspirés. Je ne voyais plus la différence entre eux et moi. Je ne savais pas le vrai, le faux, ce que je devais être, si j'étais quelqu'un. Si j'avais une personnalité. J'étais leur image. une image d´élève modèle, jamais suffisamment  intelligente, jamais assez extravertie, ou introvertie. Je devais parler, mais je parlais trop. Je devais ne pas être comme les autres, mais faire partie de la masse. Je devais être une fille, habillée en garcon, avec des cheveux courts, car c'est propre les cheveux courts. Je devais travailler pour réussir à avoir un métier intéressant , mais qui n'aurai pas fait d'ombre ou de tort. Je devais être professeur, car c'est bien professeur. Je devais être une scientifique, même si je n'avais pas d'atomes crochus avec toutes cette sciences si peu concrètes à mes yeux. Je devais devenir sans devenir. Je devais réussir étouffée et brimée. Je devais les remercier pour tout ça.

Car on remercie des parents qui lorsque vous avez 6 ans vous mettent une muselière invisible.

Alors merci à vous de m'avoir mis sur la bouche, ce harnais. Et j'ai du être reconnaissante. De tout ce qu'ils faisaient pour moi.  Car ils se sont sacrifiés pour moi. Tout ce qu'ils faisaient était pour mon bien. Les punitions injustes, la pression constante et les réaction inconstantes.  Les poupées sur le frigo face à moi pendant des jours car j'avais mangé de la mousse au chocolat. L´enfermement à la maison sans raison. Car c'est bien de rester avec ses parents. De regarder avec eux leurs programmes télévisés à 18ans. Sinon tu es une mauvaise fille. Je suis une mauvaise fille. A jamais.

Je dois dire merci pour avoir du développer des facultés de faux semblants, des angoisses terribles et des ongles rongés.

J'ai même appris à mentir, à déjouer les pièges de la psychologue à six ans. J'ai dessiné de beaux dessins de famille heureuse. Le problème venait de moi, évidemment, comment pouvais je être malheureuse avec des parents aussi aimants, stables et à l'écoute ? Alors on a mis ca sur le compte de la mamie morte. C'est bien la mamie morte. Je suis désolée tu sais mamie. Je ne vomissais pas tous les jours à cause de ton manque, je n'avais pas de migraines atroces à cause de toi. Je t'aimais infiniment. Mais tu as été mon excuse parfaite pour me sortir de cette situation. Non je devais dire que la famille était parfaite.

Mes problèmes devaient être ailleurs, toi et mon psychisme défaillant. Car j'étais faible, c'etait moi le problème.  Pas le père absent, méchant,incompétent et manipulateur. Non c'était moi, qui était anxieuse, trop sensible, qui imaginais des choses. Tout ce qui m'arrivait était psychologique. Mon Dieu,  cette phrase m'arrache des cris aujourd'hui. Je pleurerai. Je frapperai. Je deviendrai une boule énorme de colère et de haine, si l'on me redisait cette phrase. Ne m'en veux pas Dieu, mais je pourrai plus jamais accepter d'entendre que tout chez moi est psychologique. Evidemment que tout était psychologique, je vivais un enfer tous les jours. Avec un homme qui ne me connaissait pas mais voulait que je sois quelqu'un d'autre, une fille extra qui rayonne, mais pas trop, qui me prenait pour une idiote, même si je lisais tout son jeu depuis mes deux ans. Cet homme je l'ai vu tenir des mots ignobles. Je l'ai vu me regarder avec de la haine. Et parfois autre chose. Ce qui est certain c'est que ce n'était pas de l'amour. On ne fait pas ça à ceux que l'on aime. 

J'ai la chance de savoir aujourd'hui, connard, ce qu'est vraiment l'amour. Et ce n'est pas ces années avec toi. Et elle.

Je te revois dans les repas de famille. Le moment ultime de ton plan. Le mensonge d'une vie. A blaguer, à plaire à tout le monde. Sauf à moi. Je te haissais. Et je savais ce qui allait se produire. J'allais entendre sur moi des mots que jamais un père ne devrait laisser dire à personne. Je n'étais pas jolie. Je ne parlais pas assez. Je n'étais pas dégourdie. Un peu nulle quoi. Mais je faisais face. Et je devais être reconnaissante. D'avoir une maison avec un jardin. Un sweat quechua. Et des parents présents pour moi.

Alors les miens n'étaient ni alcooliques, ni drogués, ni joueurs. Je n'ai reçu aucun coup de poing. Ils étaient plus malins que ca. Les coups ils se faisaient à la maison, dans la voiture, dans ma chambre. Bien à l'abris. Et ils me couvraient de coups à l'intérieur, là où les bleus ne se voient pas. Personne ne l'a jamais vu.

Personne n'ai venu me sauver.

Alors c'est vrai, j'ai eu à manger, je ne veux pas minimiser d'autres situations tristes et malveillantes. Mais il existe en ce monde, des personnes tellement manipulatrices qu'elles vous enferment et personne ne peut le voir. Personne ne savait quelle épée était tous les jours au dessus de ma tête. Un mot, un geste suffisait pour m'en prendre plein la gueule. Pas d'autres mots désolée. J'en ai pris plein la gueule pendant plus de trente ans.

Ils ont réussis à me faire perdre la tête pendant plus de trente ans.

Je n'arrive plus à accorder de bons souvenirs à cet homme. Il m'a rabaissée. A six ans, on est une petite fille. Avec sa personnalité qui a besoin de grandir, de s'affirmer, de s'ouvrir. Je devais me mentir, mentir aux autres, et j'ai cru être une mauvaise fille. Une mauvaise personne. Je culpabilisais sans cesse. Encore aujourd'hui j'ai recours à de l'aide tellement la culpabilité m'a détruite.

En réalité, je crois que tu avais raison, j'étais ta mauvaise fille. Tu avais une autre vie ailleurs, à ton foutu boulot de merde, ta réussite et ton échec, avec d'autres gens, d'autres femmes. Et tu sais quoi, je m'en fous aujourd'hui. Ce n'était ni une excuse, ni une explication. Quand on aime quelqu'un on le laisse s'épanouir, on le regarde pousser et on est fier. De lui. Pas de soi. On ne le détruit pas. On ne lui crache pas dessus. On ne tape pas dans les murs. On ne cogne pas les portes pour en laisser des trous béants. On ne dénigre pas sa fille, on ne lui impose pas ses regrets, ses erreurs et ses mensonges. On ne la manipule pas. 

J'ai vécu en milieu hostile.

J'ai attendu que quelqu'un me serre dans ses bras et m'arrache à ce merdier. Mais ce n'est pas arrivé. J'avais trop bien obéi. Notre famille était parfaite, un homme qui nous offrait le confort d'une vie matérielle à deux francs,  une femme perdue, trahie, qui ne m'a jamais defendue, sauvée, car ce qu'elle voulait c'est entrer dans ce faux semblant. Elle n'a rien sacrifiée pour moi. Elle m'a sacrifiée pour lui.

J'ai le souvenir de ces conseils de famille affreux, ou pour une note en dessous de douze, il fallait que je recoive le dégeulis sermonal de deux êtres malades. Je le dis haut et fort , ce n'est ni grave, ni punitif,ni culpabilisant  d'avoir onze sur vingt. On est pas bête, on est pas fautif.

J'ai été la meilleure élève de ma classe presque toute ma scolarité.

La seule fois ou ce n'est pas arrivé, c'est lorsque l'on m'a obligée à faire des maths. Je ne voulais pas faire de maths. Je voulais lire et écrire, et faire de l'art plastique. Je voulais devenir.

 J'avais  compris à ce moment là à quatorze ans, que j'étais faite pour écrire et créer, montrer ma mélancolie par les images, les collages, le dessin. Que les lettres étaient aisées pour moi. J'aimais les poèmes, j'aimais savoir qu'il existait une réalité sur le papier qui m'évadait.  Et j'ai été douée plus jeune. J'avais du potentiel pour exprimer les frustrations, ma prison.

Mais en bons geôliers, je n'ai pu combattre. C'est la seule fois où je me rappelle avoir essayé.

Je n'ai plus jamais essayé.

Ils m'avaient oté ce qu'il y a de plus humain en nous, ce qui nous différencie, ce qui fait de nous des êtres de colère, des combattants, des êtres de vie et d'espoirs, des leaders, des aidants, des écoutants, ce qui te pousse à embrasser ton mari et tes enfants, cette force qui sort de ton ventre, de ta gorge, la voix.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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Commentaires
M
Quel calvaire...<br /> <br /> Je ne sais pas si écrire te libère mais je sais que les mots ont au moins le mérite de faire taire les silences.
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